La masturbation est-elle un péché?
Par l’Eglise d’abord qui se méfiait du plaisir sexuel et n’envisageait la sexualité
que dans la perspective de la procréation. On trouve encore cette manière de
voir dans la pensée de l’Eglise catholique. (Voir la réponse faite à Jenni le
12.09.2005).
A ma connaissance, la Bible ne parle pas de la masturbation. Il y a certes l’histoire
d’Onan (Genèse 38,1-10), d’où dérive onanismeŸ, autre nom de la masturbation.
Le frère d’Onan est mort. Selon la loi du lévirat (Deutéronome 25,5-6), Onan
était tenu de donner une descendance à sa belle-soeur restée veuve. Il s’y refuse,
et quand il vaŸ avec elle, il laisse la semence se perdre en terreŸ. Il ne
s’agit pas de masturbation, mais de ce que nous appellerions aujourd’hui un
coïtus interruptus.
Au côté des théologiens vinrent les médecins. En particulier le docteur Samuel-Auguste
Tissot (1728-1797), de Lausanne. Son livre, l’onanismeŸ, circula dans toute
l’Europe. Il attribuait à la masturbation l’épilepsie, la folie, les fièvres,
l’affaiblissement du corps ... De là, j’imagine, la formule disant que ça rend fouŸ.
On revient de loin, notamment sous l’influence de la psychologie, pour reconnaître
à la masturbation une place dans le développement sexuel de la personne. Très
tôt, le petit enfant joue avec son sexe. L’adolescent-e apprivoise son corps
et s’ouvre aux jeux du désir. Chez l’adulte, la masturbation peut intervenir dans
la connaissance de soi et l’expression de la sexualité. Envisagée ainsi, dans
ses différents stades, elle ne saurait être considérée comme un faute ou une
atteinte à Dieu.
La masturbation, me semble-t-il, demande cependant à être située dans une vision
globale de la sexualité, à la fois psychique et spirituelle. La sexualité prend
tout son sens dans la relation et la rencontre de deux êtres dans un amour fait
de tendresse et de respect mutuel. Tel est l’horizon que l’Evangile offre à la
sexualité. Si la sexualité se réduit à la masturbation, elle peut conduire au
repli sur soi, porter la trace d’une solitude et d’une souffrance.
Une fois encore, on ne parlera pas de faute ou de péché, mais plutôt d’une quête
d’identité, psychique et spirituelle, vis-à-vis de soi même et des autres.
(Avec l’Encyclopédie du protestantisme, Editions du Cerf à Paris et Labor et
Fides à Genève ; 1995.)
Commentaires
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thomas.deneux26.01.2008
Merci pour votre réponse qui est plus nuancée que les autres trouvées sur ce site concernant la masturbation. Je trouve cela trop facile d'excuser la masturbation, de dire que c'est normal. Mon expérience personnelle est que à chaque fois que je me masturbe je suis triste après coup de l'avoir fait, et donc j'essaie de vivre tant que je peux la chasteté dans l'attente de rencontrer quelqu'un. Pour rendre les choses moins dramatiques, je comparerais la masturbation à manger une tablette de chocolat, ou boire une bouteille de tequila seul chez soi. Bien sûr notre corps est créé pour manger, boire, jouir, mais c'est tellement triste si on s'arrête à cela, qu'on ne l'envisage pas dans le cadre de la relation aux autres. Pour ce qui concerne la nourriture il est bon de savoir être raisonnable, et réserver les quelques excès aux bons moments avec des amis. Pour ce qui concerne la sexualité, je préfère la réserver uniquement à l'union conjugale où elle devient don total de soi à l'autre. Enfin, concernant les découvertes récentes de la psychologie sur la nécessité de pratiquer la masturbation, je n'en sais rien, mais je peux partager mon expérience personnelle que dans les moment où je vais bien je n'en ressens pas du tout le besoin (où si une tentation se présente je la repousse facilement car je lui oppose mes motivations du moments), mais c'est dans les moments où le moral baisse qu'elle devient une sorte de palliatif comme d'autres peut-être vont manger / boire / fumer plus.