Reprendre le "sola scriptura" ?
Bonjour,
Je vous sollicite à nouveau à propos de la question de l'écriture seule. Je
comprends pourtant assez bien ce que vous dites à propos de la tradition et
des Ecritures, et me sent en accord.
Si dans les "dogmes" - ma réaction est partie de là - du protestantisme il y
avait simplement que la Bible est un accés à la parole de Dieu dite en Jésus
Christ, j'aurais tout de suite été d'accord.
Seulement, le "Sola Scriptura" ajoute la notion de seule, propose la Bible à
l'exclusion d'autre accés, et notamment de la tradition. Je ne suis pas particulièrement
attaché à la tradition, et je sais parfaitement que le protestantisme est né
sur une tradition devenue folle, mais je ne crois pas qu'il faille en faire une
généralité, et je m'interroge surtout sur cette attitude qui amène à penser
que la Bible exclus d'autres formes d'accès.
Ainsi, la Cène ne peut-elle être vue comme une forme d'accés à la parole dite
EN - j'essaie de bien me maintenir à ce "EN" - Jésus ? Que je sache elle a été
institutée directement par lui, elle a été pratiquée bien avant que l'on connaisse
même la notion d'évangile, et par certain coté elle donne accés au témoignage
de la vie de Jésus de façon bien plus profonde.
Elle vient d'une cérémonie juive en rapport à la Paques, qui elle même existait
bien avant que l'on écrive le premier iota de l'ancien testament, semble-t-il.
Et là aussi, par certains cotés, la paques juive porte la trace de la révélation
en Jésus Christ de façon bien plus profonde que l'ancien testament (même si ce dernier
en est un bon complément :-)
Il me semble donc - mais j'attends votre avis - que la Cène permet l'accés EN
Jésus Christ, en plus - et notez bien que j'évite soigneusement le terme de
"à l'exclusion" (qui n'aurait de toutes façons aucune signification ici) - ou
"par delà", la Bible, et que donc, il ne peut être question, même d'un point
de vue strictement protestant, de "Sola Scriptura".
Qu'en pensez-vous ?
Attention : le sola scriptura ne dit pas que le reste est dénué de sens, mais
qu'il ne peut pas faire critère pour la foi. Pour qu'une communauté se soude,
il a bien fallu qu'elle définisse des limites, qu'elle choisisse des évangiles
"à garder" et d'autres "à éviter". Le Sola Scriptura dessine les contours de ce qui
est crédible, à croire. C'est tout.
Il n'écarte pas la tradition, mais refuse qu'elle soit mise sur le même plan
que l'Ecriture elle-même. Pour dire ça de façon un peu mathématique et symbolique
: bible > tradition. C'est le sens du sola scriptura. La tradition n'a pas à
faire critère pour interpréter les Ecritures, mais c'est le contraire, c'est
l'Ecriture qui fait critère pour interpréter nos discours sur Dieu, nos traditions
(et nos trahisons). Luther poussera la démarche en rajoutant une exigence interne
à la bible : que le Christ soit la grille de lecture du reste de la bible.
Ainsi, bien sûr, des tas de choses nous poussent en Dieu. Mais seule l'Ecriture,
lue, méditée, partagée avec les autres, nous permettra d'avoir des points de
repère pour voir si ce mouvement vers Dieu est le fruit de notre psychologie,
de nos désirs, de notre pensée, de nos délires ou de nos idolâtries parfois,
ou si ce mouvement est une aspiration juste dont le Christ est l'instigateur.
Enfin, est-ce qu'il serait vraiment complètement imaginable de faire une Sainte-Cène
sans l'Ecriture aujourd'hui ? En se forçant beaucoup oui, mais assez spontanément,
la bible est un des outils pratiques, avec le morceau de pain...