Où habite Dieu ?
qu'est-ce que cela veut dire ?
Cela veut dire au moins deux choses, qui me paraissent très importantes :
1. Dieu est partout présent dans l'univers, sans se confondre avec lui. Par
exemple, si nous dessinons deux cercles concentriques, le petit disque figurant
la terre, et le grand le ciel, nous pouvons dire que Dieu habite parmi nous,
puisque la terre est contenue à l'intérieur du ciel.
2. Dieu est le maître de la vie, de toutes les dimensions de la vie. Il habite
aussi le monde où vont les gens qui meurent, "qui s'en vont au ciel". Le ciel,
c'est aussi l'autre côté de la vie. On exprime en termes de déplacement ce qui
est en fait une transformation, le passage d'une vie à une autre, comme la chenille
devient un papillon. Dieu habite les deux mondes, celui dans lequel nous vivons
et celui dans lequel nous vivrons après notre mort.
Avant la création de l'univers qui est pourtant infini, il n'y avait que Dieu.
J'aime beaucoup la réponse des Juifs à la question de savoir comment Dieu, qui
est infini, a pu trouver la place pour créer un univers infini : Dieu, dans
sa grande bonté, a accepté de se retirer un tout petit peu, afin de créer la
place nécessaire pour l'univers qu'il projetait de faire naître. C'est la tradition
juive du tsime-tsoume, du "retrait" de Dieu (si je ne me trompe pas.)
Dieu est immense, tellement grand. Sa grandeur dépasse nos capacités d'imagination.
Et le témoignage de la Bible apporte un complément tout aussi important à ce
que je viens d'expliquer. Le Seigneur, Dieu d'Israël, a montré son attachement
à notre planète en exprimant la volonté de résider dans le Temple de Jérusalem.
Ce Temple a été démoli, mais, pour la tradition chrétienne en tout cas, il a été
remplacé par Jésus, qui est vraiment le "lieu" où le Seigneur habite.
Et le Seigneur Jésus lui-même habite dans l'Église, la famille de ses petits
frères et petites soeurs. Nous sommes invités à reconnaître dans l'Église la
présence de Jésus, de ce Dieu qui habite parmi nous.
Et le Seigneur Jésus lui-même habite dans la personne de notre prochain, dans
la personne des plus petits de nos frères et soeurs, de tous ceux qui ont besoin
de nous, qui nous demandent de les aider, de les consoler, de les aimer, quelles
que soient la couleur de leur peau, leur religîon, leur position sociale, leur
handicap ou leur misère. Dieu habite réellement en eux.
Je me permettrai d'illustrer mon propos par un texte plutôt triste, mais fort
pertinent, d'Élie Wiesel, qui nous aide à approfondir cette question du "lieu"
où habite Dieu :
Un jour que nous revenions du travail, nous vîmes trois potences dressées sur
la place d'appel, trois corbeaux noirs. Appel. Les S.S. autour de nous, les
mitrailleuses braquées : la cérémonie traditionnelle. Trois condamnés enchaînés
- et parmi eux, le petit pipel, l'ange aux yeux tristes.
Les S.S. paraissaient plus préoccupés, plus inquiets que de coutume. Pendre
un gosse devant des milliers de spectateurs n'était pas une petite affaire.
Le chef du camp lut le verdict. Tous les yeux étaient fixés sur l'enfant. Il
était livide, presque calme, se mordant les lèvres. L'ombre de la potence le recouvrait.
Le Lagerkapo refusa cette fois de servir de bourreau. Trois S.S. le remplacèrent.
Les trois condamnés montèrent ensemble sur leurs chaises. Les trois cous furent
introduits en même temps dans les noeuds coulants.
Vive la liberté ! crièrent les deux adultes.
Le petit, lui, se taisait.
Où est le bon Dieu, où est-il ? demanda quelqu'un derrière moi.
Sur un signe du chef du camp, les trois chaises basculèrent.
Silence absolu dans tout le camp. A l'horizon, le soleil se couchait.
Découvrez-vous ! hurla le chef de camp. Sa voix était rauque. Quant à nous,
nous pleurions.
Couvrez-vous !
Puis commença le défilé. Les deux adultes ne vivaient plus. Leur langue pendait,
grossie, bleutée. Mais la troisième corde n'était pas immobile : si léger, l'enfant
vivait encore...
Plus d'une demi-heure il resta ainsi à lutter entre la vie et la mort, agonisant
sous nos yeux. Et nous devions le regarder bien en face. Il était encore vivant
lorsque je passai devant lui. Sa langue était encore rouge, ses yeux pas encore
éteints.
Derrière moi, j'entendis le même homme demander :
Où donc est Dieu ?
Et je sentais en moi une voix qui lui répondait :
Où il est ? Le voici - il est pendu ici, à cette potence...
Ce soir-là, la soupe avait un goût de cadavre.
(Extrait de "La Nuit".)
Si vous sentez l'amour de Dieu, la tendresse de Jésus pour vous, alors le ciel,
où Dieu habite, est en vous, au plus profond de votre coeur, de votre vie.
Bien amicalement.