Y a-t-il un jugement avant d'aller au paradis ?

La description de ce qui se passe après la mort est peut-être ce qu'il y a de
plus équivoque dans le Nouveau Testament! En fait les auteurs empruntent des
représentations de l'au-delà qui avaient cours ici et là à leur époque. Ces
représentations allaient de soi pour les écrivains qui les utilisent comme pour leurs
auditeurs. Ils n'apportent donc pas une révélation nouvelle pour leurs lecteurs
sur ce qui se passera par delà notre mort. Ne le font ni ceux qui affirment
comme Matthieu et l'Apocalypse que vous citez qu'il y aura un jugement, ni ceux
qui affirment comme Jésus crucifié au "bon larron" selon l'évangile de Luc:
"Aujourd'hui même tu seras avec moi dans le paradis" (23,43)... Ils veulent
dire quelque chose d'autre. Matthieu, par exemple, insiste sur l'importance
du jugement, mais l'évangile de Jean qui insiste aussi sur cette importance
du jugement dernier n'a pas besoin de le renvoyer par-delà notre trépas. Il
a lieu, selon lui, maintenant déjà en fonction de la manière dont je me situe
face au Christ et face à ce qu'il me dit de la part de Dieu (cf. Jn 3,18; 5,21-29).
Le crucifié de Luc veut dire au bon larron que rien désormais ne le sépare de
Dieu, qu'il y ait ou non jugement après la mort. Il dit la même chose que ce
qu'affirme autrement Paul en Romains 8, 35ss., lequel Paul ne s'adresse pas de
la même manière aux Thessaloniciens (4,13ss.) ou encore aux Corinthiens (I Cor
15,35ss.), tout en leur disant fondamentalement la même chose.
Toute cette diversité nous incite à relativiser l'importance de tel schéma ou
de tel autre. Cette diversité de représentations nous dit que nous ne pouvons
pas connaître le quand et le comment de la résurrection, de la fin du monde,
du jugement dernier... Ce qui importe, c'est d'être prêt (cf. Mc 13,32-37): être prêt
à voir ce monde prendre fin pour moi (lors de mon trépas), à ne plus rien pouvoir
changer à ma vie (et à toutes les oeuvres qui la composent). Etre prêt, c'est
aussi ne pas redouter excessivement la mort puisque ce n'est pas la mort qui a le dernier
mot sur nos vies, mais Dieu, puisque rien ne peut nous séparer de l'amour de
Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur, ni la vie, ni la mort, ni le
présent, ni l'avenir... (Rm 8)