Un sentiment de honte est-il signe qu'un acte est mal devant Dieu?
J'ai regardé les réponses qui ont été données au sujet de la masturbation car je me posais des questions à ce propos. Mais un aspect me tourmente encore : pourquoi ressentons-nous, après la masturbation un sentiment de culpabilité, de honte presque? Est-ce que cela signifie que c'est mal devant dieu?

Bonjour,
Vous parlez explicitement de la masturbation, mais je pense que ce que vous caractérisez est plus général et peut s'appliquer à plusieurs domaines de notre existence.
Les moralistes de tout temps ont présenté la conscience comme la voix de Dieu à l'intérieur de l'homme, une communication quasi directe de l'exigence divine nous guidant dans nos choix éthiques et nous donnant "mauvaise conscience" ou nous rendant honteux si nous transgressions ces exigences. Depuis, notamment de par des "sciences" comme la psychanalyse ou la sociologie, nous sommes beaucoup plus prudents: les psychanalystes ont notamment montré qu'il y avait dans la formation de la conscience une forte influence des interdits parentaux ou sociaux que nous avons fait nôtres, ce que Freud appelait le "surmoi". Ce surmoi peut être très fort chez certains, mais il serait trompeur de le confondre avec Dieu...et même dangereux spirituellement. Ne pourrait-on pas comprendre la célèbre phrase de l'apôtre Jean : "Si notre coeur (= surmoi) nous accuse, Dieu est plus grand que notre coeur et il connaît toutes choses" comme l'affirmation que Dieu étant Amour Inconditionnel, il nous libère de toute culpabilité, plutôt que de nous enfoncer dans la honte. Certains philosophes, très critiques vis-à-vis de l'Institution Eglise, ont affirmé aussi que l'Eglise exerçait une pression très forte sur les fidèles en fixant des règles morales strictes comme venant de Dieu et en aiguisant les "consciences" (avec notamment la peur du chatiment divin) pour garder les personnes sous son pouvoir.
Alors, la conscience voix directe de Dieu ou construction humaine pour nous infantiliser? Il me semble que ces deux points de vue sont extrêmes! Certes, la formation de notre "conscience morale" est un processus long et où nous avons subi beaucoup d'influences: Les prescriptions parentales, les moeurs de notre société, le catéchisme, etc... L'important est d'être assez lucide et adulte pour prendre de la distance avec cela et tenter de déterminer les valeurs qui nous importent et de les hiérarchiser. Dans ce choix personnel, nous pouvons nous sentir "coupables" de certains manquements, de choix de vie erronés, d'actes qui nous semblent des fautes, parce qu'ils coupent la relation avec les autres, avec Die ou avec nous-mêmes.. La "conscience" nous aide alors à nous retourner et à progresser... Et c'est bien un problème aujourd'hui que de voir certaines personnes totalement dépourvues de conscience morale et qui n'arrivent pas à voir la gravité de leurs actes (mais là je ne parle évidemment pas de la masturbation!). En ce qui concerne la masturbation, pour certains, elle peut être ressentie comme mauvaise, parce qu'elle manifeste une sexualité solitaire ou parce qu'elle est compulsive, pour d'autres, elle peut être vécue comme un épanouissement. Il me semble que ce n'est pas à un homme (ou une femme) d'Eglise d'établir des normes extérieures culpabilisantes ou "déculpabilisantes", mais que c'est à chacun de voir comment tel acte s'inscrit dans sa propre dynamique de croissance!
Tout en sachant que Dieu ne s'identifie pas simplement à la conscience...et qu'il n'est pas là pour redoubler notre auto-accusation par une Accusation encore plus forte, mais pour nous sortir de cette logique d'accusation par son Amour et son Pardon!