Peut-on vivre sa liberté en Christ hors d'une Eglise ?

J'aimerais prendre votre question à rebours : pourquoi, en fait, vouloir vivre
votre foi hors d'une communauté ? Avez-vous eu de mauvaises expériences dans
certaines Eglises ? Pensez-vous que ce n'est qu'en collectant les opinions du
plus grand nombre possible de personnes que vous vous approcherez le mieux de la
vérité ?

Pour ma part, je pense que la foi chrétienne (comme toute forme de spiritualité,
d'ailleurs) s'inscrit dans une longue tradition de communautés, qui ont transmis,
génération après génération, le message de l'Evangile jusqu'à nous - avec des
erreurs, des divergences, et tout ce qu'on veut, mais enfin, elles l'ont fait.
C'est dans la lignée de ces communautés que nous poursuivons cette tâche de
transmission et d'annonce de l'Evangile. Seul dans son coin, on ne peut que
butiner d'une communauté à l'autre, sans jamais s'inscrire soi-même dans cette
lignée.

De plus, je pense que la foi chrétienne est, par essence, une forme de spiritualité
qui demande une communauté pour pouvoir être vécue pleinement. En effet, le
Christ nous appelle à l'amour de notre prochain, au partage, à une forme nouvelle
de relation avec Dieu, et entre humains. Croire en Jésus-Christ, c'est croire
qu'il est possible de renouveller nos relations, en les fondant sur l'amour
et sur la justice... et je vois difficilement comment faire cela sans s'inscrire
dans une communauté. En effet, c'est en vivant proches des autres membres d'une
communauté que l'on peut apprendre à expérimenter des relations nouvelles. Cela
demande d'accepter l'autre avec ses faiblesses, avec tout ce qui nous énerve
et nous fatigue, et cela n'est pas toujours facile. Mais ce n'est qu'à ce prix-là que
nous pouvons vraiment expérimenter l'amour du prochain. Ne fréquenter que les
gens qui nous plaisent bien, et éviter ceux qui nous énervent, c'est avoir mal
compris le coeur même de la foi chrétienne.

Enfin, je pense qu'il y a une richesse immense dans l'acte de prier Dieu et
de le chanter ensemble, en communauté... à deux ou trois, ou à cinquante, qu'importe.
Mais ensemble. Il y a également une grande richesse de partage et de fraternité
que l'on perd si l'on reste dans son coin. C'est vrai que, seul, on n'a pas besoin
de s'énerver avec des gens qui nous "pompent l'air". Mais seul, on ne peut pas
non plus partager ses soucis ou ses joies avec des gens qui vivent la même foi
que nous, et je suis convaincue qu'on est perdant au change.