La Parole est-elle le Christ ou Jésus-Christ?

Cher Henri de Vaucluse,

        Il y a deux manière d’entrer en théologie chrétienne. L’une élabore – sur une base philosophique ou de science des religions – une « théorie » à propos de Dieu. Elle détermine en particulier quelles sont les caractéristiques de la présence de Dieu au monde. C’est ce que vous appelez sa présence christique. Ensuite elle reconnaît dans telle figure religieuse de l’histoire humaine la manifestation plus ou moins pure de cette « présence christique ». Elle reconnaît en particulier en Jésus, le Christ. Elle la reconnaît lors de la création…

        L’autre entrée en théologie consiste à confesser que Jésus est le Christ de Dieu, c’est-à-dire celui que Dieu s’est choisi pour se manifester « une fois pour toutes » à l’humanité (ex. : Hbr 10.10). Ensuite, sur la base de cette confession de foi, elle reconnaît ou ne reconnaît pas des manifestations christiques dans d’autres figures humaines.

        Vous êtes tenant de la première entrée en théologie qu’on peut dire par la philosophie religieuse. Les commentateurs de la Segond 21 sont plutôt des tenants de l’autre entrée : par une confession de foi. Vous faites confiance aux lumières de la raison pour entrer dans une réflexion théologique. Eux font confiance à la parole transmise par les auteurs du Nouveau Testament confessant Jésus comme le Christ.

        Personnellement je pense que la raison usurpe ses capacités lorsqu’elle se croit capable de dire qui est Dieu pour ensuite le reconnaître dans telle ou telle figure de l’histoire mondiale. Il y a là un usage de la raison qu’après la Critique de la Raison Pure de Kant on ne peut plus faire. Cela nous condamne à fonder notre réflexion théologique sur une hypothèse confessante. Et qui dit « hypothèse » dit aussi vérification ou réfutation… par l’expérience de notre relation à Dieu, à nous-mêmes, aux autres, au monde…