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Quelle peut être la croix pour les chrétiens dans notre société?

etipan 05.06.2010 Thème : Bible: ce que disent les textes Bookmark and Share
Réponse de : Michel CornuzMichel Cornuz

Bonjour,

D'abord, il faut souligner que la "croix" ne signifie pas dans ce contexte toute souffrance qui peut arriver aux chrétiens ou à tout être humain dans son existence. On l'entend trop souvent ainsi aujourd'hui : "A chacun sa croix" pour commenter une fatalité. Ce contre sens est dangereux spirituellement car il fait de Dieu l'auteur du mal qui blesse l'être humain, le confondant avec le "fatum", le "Destin" des Anciens, et valorise la souffrance comme chemin de salut, ce qui conduit à un dolorisme malsain!

Dans les paroles de Jésus, il s'agit d'une forme de "souffrance" qui est la conséquence de la "suivance" de Jésus Christ. Se mettre en route à la suite de Jésus, suivre le chemin qu'il a suivi d'obéissance à son "Père" et d'amour jusqu'au bout du prochain, chemin de don de soi et d'humilité, entraîne des conséquences qui peuvent être d'une certaine manière douloureuses. On suit le Christ sur le chemin qui l'a mené à la croix, on "porte donc sa croix", et on est confronté aux oppositions qu'il a pu rencontrer. A son époque, c'était l'opposition des autorités religieuses qui craignaient pour leur pouvoir...aujourd'hui, dans notre société du Tout économique, ce peut être l'opposition de ceux qui placent l'argent au centre avant tout respect de la personne. La défense des plus faibles dans notre société peut aussi nous mettre en porte-à-faux. Une certaine manière de vivre de manière cohérente à la suite du Christ peut aussi susciter moqueries et railleries dans une société où le modèle est la santé, la jeunesse, la réussite (et pas tellement le don de soi par amour!). Donc, je pense qu'il y a encore de nos jours un certain risque à vivre sa foi chrétienne "chaque jour" comme le dit Luc, donc dans son quotidien, même si ce risque n'est plus la persécution physique.

On peut encore approfondir ce verset: Vous avez omis le début : "Si qqn veut me suivre, qu'il renonce à lui-même et porte sa croix...". On pourrait faire de ce "et" un explicatif : Porter sa croix, c'est renoncer à soi-même. Renoncer à son autonomie illusoire, à se placer comme centre de perspective, en vue d'une vie décentrée vers Dieu et vers autrui. "Porter sa croix" deviendrait alors l'équivalent de ce qu'affirme l'apôtre Paul : Le chrétien qui est en communion avec le Christ a "crucifié" l'être ancien (le moi replié sur lui-même, autonome, qui se coupe de Dieu et des autres) pour une vie nouvelle en Christ (dans l'ouverture à Dieu et aux autres). On ne fait ainsi plus seulement une lecture morale de cette injonction de Jésus, mais une lecture théologique et existentielle:

Porter sa croix c'est alors renoncer à soi-même et vivre de la grâce seule de Dieu, comme Jésus a vécu. Il n'y a aucune opposition entre salut par la grâce seule et marche à la suite de Jésus. Si je peux suivre Jésus sur son chemin qui conduit à la croix, c'est la conséquence du salut offert par Dieu en Christ de manière gratuite, c'est la conséquence de cette libération de chercher à vivre par mes propres forces (egocentrisme) pour me laisser conduire par l'Esprit de Dieu à la suite du Christ.



Commentaires

  • florence05.06.2010
    Félicitations à Monsieur le Pasteur pour sa remarquable analyse. J'ajouterai, mais ça ne contredit en rien sa réponse, qu'un prêtre anglican m'a dit que : "qu'il porte sa croix" serait une allusion au martyre que certains devaient subir.