Quelle est l'origine du mal?

mettez-moi de vous poser une question qui me préoccupe beaucoup. Il s'agit
de l'origine du Mal.
La plupart des ouvrages que j'ai lus à ce sujet (+ différents sites) nous présente
le Mal comme un profond mystère. Presque comme s'il n'y avait aucune explication
plausible. Et c'est ce qui me surprend. Pourquoi lit-on presque toujours que
le chrétien est invité à se détourner d'une explication du mal qui ne peut être
que stérile et insuffisante, alors qu'à mon avis une explication simple existe
(trop simple peut-être) ? Mon explication est la suivante : le mal est la marque
de l'inachèvement de la Création. La souffrance est le fruit mauvais, pourri, des
accidents d'une création inachevée, de l'évolution. Les progrès du monde ne
peuvent se faire qu'au prix de beaucoup d'insuccès et de beaucoup de blessures.
La souffrance s'introduit inévitablement dans le monde, non pas en vertu de
quelque déficience de l'acte créateur, mais par structure même de l'être participé.
Dans le système en voie d'organisation, il est fatal que, en cours de route,
des désordres locaux apparaissent.
Mon explication possède probablement une déficience ou une lacune (que j'ignore)
puisque cette explication est rarement exprimée. On parle toujours que c'est
par l'homme que la mort et l'injustice se sont infiltrées dans le monde (par
son désir d'autonomie il s'est délié de sa Source). Ou alors dans le cadre de la justice
supérieure de Dieu qu'un mal vécu peut punir ou corriger un mal commis ou alors
protéger d'un mal encore plus grave qui aurait pu être vécu ou commis.
Pouvez-vous me dire si l'inachèvement de la Création est une explication raisonnable
du Mal ? Et si oui, pourquoi cette explication est souvent écartée dans les
livres et sites traitant de ce sujet en préférant conserver l'énigme?
Je vous remercie par avance de votre excellente collaboration.
Bien à vous.
Je partage entièrement votre intuition quant à l’origine du mal. Bien sûr, on
ne peut pas faire entièrement abstraction d’un élément de mystère, car nos intuitions
ne peuvent jamais être des certitudes absolues, ce qui ne signifie pourtant
pas qu’elles doivent être écartées. Dans mon ministère de prédication, j’ai depuis
des années privilégié l’interprétation que vous proposez, à savoir en effet
que la création est inachevée, qu’elle est en plein chantier, et que par conséquent
les accidents de chantier sont inévitables, étant donné les déficiences des ouvriers
auxquels Dieu a confié ce chantier. Au chapitre 8 v.22 de sa lettre aux Romains,
l’apôtre Paul nous dit (c’est une de ses intuitions géniales)  la création
toute entière gémit maintenant dans les douleurs de l’enfantement Ÿ. Mais
Paul dit aussi au v. 19  la création attend avec impatience la révélation des
fils de Dieu". Comme vous le mentionnez, il en va donc aussi de la responsabilité
de l’homme dans ces  douleurs de l’enfantement Ÿ de la création ; car l’homme est appelé
à être ouvrier avec Dieu dans l’achèvement de cette création, autrement dit
pour l’avènement du règne de Dieu. Dans ce sens, on peut certes parler du 
péché Ÿ de l’homme qui entrave la création ; mais le mot grec qu’on traduit
par péché Ÿ, amartia, signifie  ce qui manque la cible Ÿ.. C’est donc dans
la mesure où l’homme manque (ou rejette) la cible qui lui est proposée que la
création est mise en péril.
Je vous remercie de nous avoir fait partager le fruit de votre réflexion.