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A propos du jugement de Dieu...

23.12.2004 Thème : Christianisme et autres religions Bookmark and Share
Réponse de : Jean-Denis KraegeJean-Denis Kraege
teur Kraege, à propos du jugement de Dieu :

Je vous remercie d?abord pour votre réponse, et vais tenter de mieux poser ma
question.

Elle porte sur la conception d?un Dieu qui juge, et qui nous aime secondairement
à ce jugement : son Amour n?est alors pas gratuit. Je ne suis pas d?accord avec
cette conception-là. Vous dites qu?un Dieu qui aime seulement est un peu facile
et rassurant. Certes. Mais ne pensez-vous pas qu?un tel Dieu, parce qu?il sait
ce qu?est le Bien et le Mal, et qui nous juge à la fin, nous qui n?avons qu?une
connaissance très imparfaite de ce qu?est le Bien et le Mal, est tout aussi
facile et rassurant ? On touche là un point très important et très sensible chez
chacun d?entre nous : la responsabilité de nos actes liée à une certaine lecture
de la Bible.

Je peux en effet me réfugier derrière des paroles bibliques pour justifier mes
choix personnels :  Il est mal de divorcer, il est mal de s?opposer à la volonté
du mari, donc je ne divorce pas Ÿ, pour ne prendre qu?un exemple concernant
notre société actuelle, et qui touche davantage les femmes, qui demandent le divorce
beaucoup plus souvent que les hommes. Cela peut m?éviter, en tant que femme,
de prendre mes responsabilités et mon  courage à deux mains Ÿ, c?est-à-dire
de faire mes propres choix de vie. Cette dérive est pour moi douloureuse à comprendre
de la part de chrétiens se réclamant du Dieu d?amour, car comment Dieu va-t-il
juger cette femme-là, qui renonce à divorcer d?un mari violent ? En Bien ou
en Mal ? Elle est piégée de toute façon : aux yeux de Dieu (croit-elle) si elle
a divorcé puisqu?elle Lui a donc désobéi (croit-elle), et à ses propres yeux,
si elle n?a pas divorcé puisqu?elle a  gâché Ÿ sa vie, et parfois celle de
ses enfants, s?ils ont été victimes de violence. Cet exemple, extrême, n?est pourtant
pas rare, et nous connaissions tous ces situations douloureuses et révoltantes.

C?est dans cette optique-là que le  Dieu qui juge Ÿ est pour moi un refuge,
un alibi, une consolation qui m?évite parfois d?avoir le courage de mes choix.
Et quand on est dans cette conception-là de Dieu, le risque est grand, si je
 craque Ÿ, de faire de Dieu le responsable de ma vie, alors que c?est d?abord
de ma responsabilité de divorcer ou pas (dans l?exemple cité plus haut). Etes-vous
d?accord sur ce point ? Je crois, moi, en un Dieu d?Amour, qui ne juge pas,
car son amour va au-delà de tout jugement : il y a ma conduite visible, de celle-là
je suis responsable, mais il y a mon c?ur, en grande partie invisible, et c?est
mon c?ur que Dieu jugera D?ABORD ? même si je suis le pire criminel. C?est cette
Espérance-là qui fait vivre.

Il y a un autre risque : si Dieu est Juge avant d?être Père aimant, je peux
alors facilement faire l?économie de mon propre jugement, et m?en remettre entièrement
à Lui pour prendre mes décisions, comme un enfant qui se décharge de ses  bêtises
Ÿ sur la responsabilité de son père. Une autre manière de dire :  Je m?en lave
les mains Ÿ. La justice jugeante de Dieu, c?est malheureusement parfois, pour
certains chrétiens (pas tous), le rôle du gendarme sur le bord de la route :
j?ai peur du gendarme, je risque gros, mais je continue à rouler comme un fou,
c?est plus grisant et plus excitant... justement parce que c?est interdit !
Un rôle trop répressif peut avoir cet effet pervers : pousser à dépasser les
limites, et se déresponsabiliser totalement.

Mais le Dieu qui juge peut aussi, à l?inverse, devenir un garde-fou contre d?anciennes
conduites déviantes (alcool, femmes etc.) et être une aide précieuse pour le
chrétien qui s?est  repenti Ÿ et qui a besoin de Lui, de peur de retomber dans
ses anciens travers. Seulement, si Dieu est réduit à l?état de béquille, le risque
est de l?instrumentaliser et de vouloir l?imposer aux autres qui, eux, n?ont
pas forcément besoin d?un canne pour marcher, mais d?un partenaire pour aller
de l?avant ! Ce qui est utile pour celui-là, qui en a besoin, peut devenir carcan
pour un autre, qui n?a pas besoin d?être mené par la main et surveillé dans
sa conduite, mais libéré, pour vivre pleinement sa vie : et seul l?Amour inconditionnel
de Dieu peut libérer celui-ci, pas la menace de son jugement qui ne doit être
qu?une étape éducative, pour ne pas enfermer le pécheur dans sa faute?

Pour résumer : je ne peux me sentir responsable de mes actes devant Dieu, que
si je prends MES responsabilités, et donc s?il me laisse cette liberté de faire
AUTREMENT que ce que Lui a prévu pour moi. Personnellement, j?ai besoin de me
savoir pleinement aimée de Dieu, pour vivre pleinement ma vie, et je ne peux
envisager de sa part qu?un jugement éducatif, non répressif, car la répression
ne fait pas grandir ni évoluer. Ma position est libérale, résolument, et je
crois en ce Dieu-là, Père qui accompagne ses Enfants, et qui les aime jusqu?au
bout, au-delà de tout ce qu?ils ont pu faire, et surtout : sans les dispenser
de leurs responsabilités, mais en leur pardonnant le mal qu?ils ont fait. Je
peux punir mon enfant, mais la punition ne sera efficace que s?il est conscient
de sa mauvaise action. En somme : Dieu nous aime, nous ses Enfants, comme un
père aime ses enfants devenus adultes, responsables de leurs actes, en gardant
la bonne distance. Mais cette bonne distance entre Dieu et ceux qui croient
en Lui n?est pas facile à trouver, tout comme dans les relations entre les humains?

Je vous remercie de m?avoir lue jusqu?au bout.

J?apprécie beaucoup votre site, l?ouverture d?esprit qu?on y trouve et la possibilité
de discuter de problématiques qui  travaillent Ÿ notre foi. Au plaisir de vous
lire, peut-être?

Caro
Chère Caro,

Merci de vos précisions. Cela valait la peine que je vous les demande, car maintenant
j'ai beaucoup mieux saisi ce que vous entendiez. Je ne pourrai bien entendu
pas répondre à l'entier de vos remarques. Voici quelques éléments de réponse.

Tout d'abord à propos de l'amour de Dieu qui serait second par rapport à son
jugement. Je ne crois pas avoir affirmé cela. En tous les cas, ce n'est tout
simplement pas à mes yeux vrai. Il faut à mon sens maintenir absolument les
deux pour bien parler de Dieu. Il faut même aller jusqu'à dire que c'est l'amour
de Dieu tel que manifesté en Jésus-Christ qui nous juge ou plutôt que nous nous
jugeons selon la manière dont nous recevons cet amour de Dieu (cf. Jean 5,24).
Inversement le jugement dernier de Dieu peut être reçu comme une marque libératrice
de son amour dans la mesure où il remet à leur place tous les jugements avant-derniers
que nous pouvons prononcer ou que les autres, la morale etc. peuvent prononcer
sur nous...

Ensuite, entièrement d'accord avec vous lorsque vous dites que le jugement de
Dieu est toujours éducatif et jamais répressif ou, ajouterai-je, vengeur. C'est
par amour pour son peuple (et donc pour nous) que Dieu dit dans la Bible des
paroles de jugement. Il n'a qu'un souci: nous faire revenir à Lui, nous inciter à croire.
N'est-ce pas là la marque de son amour ?

Toujours d'accord avec vous lorsque vous avez le souci de conserver à l'homme
toute sa liberté et donc toutes ses responsabilités devant Dieu. Ce n'est pas
parce que Dieu est juge que je pourrais me dire irresponsable. C'est au contraire
devant mon Juge que je suis invité à me découvrir totalement responsable. Cela
m'amène à reprendre votre exemple éclairant de la femme qui n'ose pas demander
le divorce. La seule question, lorsqu'une telle femme se demande que faire:
demander ou ne pas demander le divorce, consiste pour elle à se demander: "Qu'en pense
Dieu? Comment Dieu en jugerait-il, en jugera-t-il?". Il ne s'agit pas de se
demander ce que la morale en pense. Le jugement de Dieu peut aller contre nos
petites morales humaines (cf. ci-dessus). Or je ne crois personnellement pas
que Dieu soit inconditionnellement contre le divorce. Il y a effectivement des
situations où le bien-être des enfants, de l'épouse, de l'époux doivent passer
avant la morale, quand bien même celle-ci serait tirée de la Bible. Il y a des
évidences qui peuvent s'imposer à nous et qui nous paraissent alors aller pleinement
dans le sens de ce que Dieu juge bon. N'allez pas comprendre que tout soit permis
devant Dieu. C'est en conscience et en se remettant vraiment devant Dieu que
ce genre de décision peut être prise. Il ne s'agit absolument pas d'un oreiller
de paresse. Toujours je reste responsable de ma décision. Mais je puis aussi
toujours aller de l'avant car je sais que, même si je me suis trompé et que
Dieu me juge négativement dans la décision qui a été la mienne, il m'a déjà,
dans son amour, pardonné.



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