Où en est le dialogue entre juifs et chrétiens?
je me demandais où en était le dialogue entre juifs et chrétiens aujourd'hui? dans quelle direction va ce dialogue? je me demandais si un véritable dialogue est possible dans le domaine du spirituel/théologique (car il va sans autre que du domaine de l'éthique et de valeurs en commun cela pose moins de problèmes)? j'ai commencé à y réfléchir après avoir regardé des émissions produites par le théologien catholique Hans Küng, et sa "Stiftung Weltethos", mais aussi après avoir rencontrés de plus en plus d'impasses dans mon cheminement personnel (je me rends de plus en plus compte que je ne peux pas être juive et chrétienne à la fois; il y a trop d'incompatibilités telles que le péché originel, la divinité du Christ/Jésus, Trinité, la mort du Christ pour nos péchés, Jésus-messie... un choix s'imposera pour moi, et tends de plus en plus vers le retour au judaisme car D.ieu n'a nullement abrogé son alliance avec son peuple, ou l'a remplacé par l'Eglise, "verus Israel").
Merci beaucoup et un bon weekend.
Bonjour Chaya
Vous avez raison de dire que Dieu n’a nullement abrogé son alliance avec son peuple et encore moins remplacé ce peuple par l’église. Je dirais plutôt que cette alliance a été élargie au monde. Je crois que juifs et chrétiens continuent à faire partie du même peuple de Dieu. En faveur d’un éventuel « retour au judaïsme » on peut dire qu’effectivement, les juifs possèdent dans leur tradition tout ce qui est nécessaire à la foi en Dieu et au salut. Pourtant les incompatibilités que vous mentionnez sont toutes des constructions doctrinales élaborées par les conciles chrétiens du 4ème siècle, à un moment où l’église officielle, aveuglée par son antijudaïsme, avait perdu le sens da sa continuité avec Israël.
Israël a joue un rôle fondamental dans la constitution de la foi chrétienne. Comme le dit Paul dans sa très belle parabole de l’olivier « n’oublie pas que ce n’est pas toi qui porte la racine, mais ta racine qui te porte ». La relation antre les chrétiens et les juifs ne s’apaisera que lorsqu’on aura abandonné toute arrière-pensée de récupération et toute velléité d’impérialisme religieux.
Cela suppose évidemment pour les chrétiens un réexamen complet du rôle du Christ. La théologie chrétienne libérale s’est engagée dans cette voie. On redécouvre que l’homme Jésus de Nazareth a été envoyé pour réformer le judaïsme, alors corrompu, et non pour le remplacer. Il est venu rendre son vrai sens à la loi de Dieu, celle qui avait inspiré le message des prophètes d’Israël. Et ce message avait une valeur universelle, c’est pourquoi il s’est répandu dans le monde. La seule incompatibilité qui pourrait demeurer est la question de la résurrection. Or là, même pour les chrétiens elle reste un mystère qu’on n’a jamais réussi à cerner, sauf en le dogmatisant. Juifs et chrétiens sont infiniment plus proches aujourd’hui qu’aux premiers siècles.
Je ne suis pas au courant des aspects « techniques » des dialogues engagés entre institutions juives et chrétiennes. Mais on peut dire que l’attitude de plus en plus de milieux chrétiens (sauf les fondamentalistes…) a évolué de façon radicale, après le tournant crucial de la shoah, dans le sens que je viens d’évoqué, ce qui représente un pas de géant vers le dialogue et la compréhension mutuelle. On peut donc dire que le dialogue ne doit pas se limiter aux valeurs communes, mais que le terrain spirituel et théologique lui est désormais ouvert.