Quel avenir pour l'oecuménisme ?

Je ne puis, malheureusement, que confirmer votre appréciation de la situation.
Je pense que nous nous sommes faits de part et d'autre des illusions il y a
35 ans sur ce que pouvait être le dialogue et le rapprochement entre Eglises.
Comme vous le dites fort bien, nous avons trop vite passé par-dessus nos différences
et nos traditions. Nous n'avons vu que ce qui nous unissait. Et encore avons
nous souvent cru que nous étions d'accord alors que nous mettions sous les mêmes
mots des sens bien différents. Nous avons, nous autres protestants, cru que le
mouvement entamé à Vatican II, selon notre lecture de ce concile, pouvait conduire,
sinon à une fusion, du moins à de très sérieux rapprochements entre Eglises.
Ces illusions n'ont (bienheureusement) pas résisté au temps. J'écris "bienheureusement"
parce qu'il vaut mieux tenir compte de la réalité que se bercer d'illusions.
On notera toutefois que les mises au point sont venues essentiellement de Rome.
Rome nous a rappelé, via Dominus Jesus, que les Eglises protestantes n'étaient
pas vraiment des Eglises. Est venu ensuite la mise au point d'un certain Jeudi
saint sur l'Eucharistie qui venait confirmer ce que les évêques suisses avaient déjà
précisé il y a bien quelques années: aucune hospitalité eucharistique et interdiction
aux catholiques de participer à la Cène protestante. Comme vous le faites remarquer,
ce mouvement se poursuit au niveau des événements paroissiaux: les protestants
ont encore la naïveté d'y croire et restent ouverts alors que les catholiques
ne rendent plus la pareille. Certes il subsiste des exceptions, mais le mouvement
général, me semble aller dans ce sens. Et les protestants de faire preuve de faiblesse
en offrant sur un plateau leur cathédrale aux catholiques-romains qui de deux
célébrations annuelles en arriveront bien évidemment à en revendiquer très bientôt
davantage. Heureusement qu'il y a eu la récente réaction de la FEPS pour commencer
à offrir un tant soit peu de résistance à cette phagocytation des communautés
ecclésialesŸ par la seule Eglise qui soit.
Je ne pense cependant pas que tout espoir soit mort en matière de dialogue interconfessionnel.
J'estime que c'est à notre tour, nous protestants, d'attirer maintenant les
catholiques romains sur notre terrain. Ils nous ont déçu sur celui des institutions sur lequ
el nous ne pouvons pour l'instant plus rien espérer. Proposons-leur de retravailler
ensemble sur un autre terrain commun: nos lectures de la Bible. Je suis frappé
combien l'effort de la grande période de l'oecuménisme à laquelle vous faites
allusion était centré autour de la publication de la TOB, de l'exégèse commune des
textes et combien cela à presque totalement disparu aujourd'hui. Créons donc
des groupes d'étude biblique communs et si l'institution ne veut pas en entendre
parler, invitons nos frères et soeurs catholiques à venir nous retrouver sur ce
terrain qui, par excellence, nous est commun, même si nous avons en la matière
des traditions de lectures bien différentes. Pourquoi ne pas nous retrouver
aussi, me direz-vous, dans la prière en commun et dans l'action caritative
commune ? Nous le faisons déjà. Continuons à le faire, mais ici aussi sans illusion:
ce n'est malheureusement pas 50 ans de prière commune, ce ne sont malheureusement
pas chaque année des actions de carême-PPP communes qui nous font nous retrouver
sur l'essentiel de nos scandaleuses divergences et qui sont susceptibles de
transformer fondamentalement nos rapports.