Et pourquoi n'atteint-on pas l'âge canonique des patriarches ?

Admettons qu'Abraham soit mort à 175 ans. En rêvant d'un progrès infini de la
médecine, à l'extension sans borne de l'espérance de vie... c'est presque vraissemblable.
Et alors, pourquoi ne pas avoir cette chance ? ou cette malchance ? (pensons
aux désagréments de la longévité... des personnes âgées réclament la mort comme une
délivrance)
Mais si vous lisez Genèse 5,5 vous voyez qu'Adam est mort à 930 ans. Là, on
s'interroge. S'agirait-il d'un chiffre symbolique ? Pas exactement, mais cette
longévité exagérée fait glisser l'interprétation vers un autre ordre de valeur
que la stricte mesure de la durée biologique.
Adam, les patriarches... sont des figures tutélaires pour lesquels la tradition
narrative du Proche Orient ancien avait coutume de donner une espérance de vie
singulière. Et c'est rien par rapport aux rois mésopotamiens dont certains pouvaient
être chargés de 30 000 années d'existence! Cette convention littéraire a un sens :
elle permet de placer ces figures dans un temps qui n'est pas celui du quotidien
ou du banal. L'attention, comme la mémoire qu'on en a, doit être particulièrement
vigilante. Voilà ce qui nous est signifié.
Vous remarquerez qu'au fil des généalogies, les personnages rattrapent notre
espérance de vie. Cette coquetterie qui n'avoue pas l'âge réel dit beaucoup
sur les valeurs des rédacteurs. Un destin singulier, c'est à la fois une vie
exceptionnellement longue où peut-être l'homme met du temps à comprendre ce qu'est
la vie et une vie chargée d'années et de bénédictions. Tout le contraire de
la rapidité avec laquelle on présente la création du monde par Dieu : 6 jours
!
Vous voyez Jean, votre question n'est pas simpliste. Elle interroge, peut-être
sans le vouloir, la lecture strictement littérale du texte biblique.